L'IRRESISTIBLE ASCENSION DE L'INSOLENTE MARION / EMMA DEBROISE
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LE MOT D'EMMA DEBROISE
Autrice de "L'Irrésistible ascension de l'insolente Marion"
C’est au cours d’une conversation avec l'auteur et metteur en scène Jean-Yves Brignon en 2018, que je découvre l'existence de Marion du Faouët. Nous nous retrouvons sur l’envie de monter un spectacle dans la veine des comédies héroïques, avec leurs personnages hauts en couleur, leurs rebondissements et leurs répliques pleines de panache. Avec le constat édifiant que les femmes y sont rarement à l’honneur.
Il me parle de son envie d’écrire une pièce inspirée de la vie de cette brigande légendaire, révoltée contre la misère et la condition des femmes au 18ème siècle. Quatre ans passent, la situation sociale et politique en France se détériore, et la nécessité de créer ce spectacle se fait de plus en plus pressante. Nous organisons une séance de travail à l’issue de laquelle nous convenons que je prenne en charge l’écriture et lui, la mise en scène. Ayant, entre temps, collaboré ensemble sur une version très fougueuse d’Andromaque de J. Racine, je suis inspirée par une première scène en alexandrins. Le processus créatif est enclenché et je plonge avec passion dans les aventures de cette femme hors norme.
L’histoire de Marion du Faouët est en cela fascinante qu’elle va à contre-courant de toutes les normes sociales et de genre. C’est un récit de désobéissance et d’interrogation des stéréotypes dans une époque, sans doute plus affectée qu’aujourd’hui par la misère et le sexisme, mais qui résonne cependant étrangement avec l’actualité, à travers le fossé des inégalités qui se creusent et le retour à une pensée de plus en plus conservatrice.
En étudiant l’époque, je m’aperçois que les leviers qui organisent la société n’ont quasiment pas changé depuis l’Ancien Régime : récit justifiant les inégalités, opacité des règles, conflits d’intérêts, désir mimétique, boucs émissaires, dévalorisation du féminin, stigmatisation des plus fragiles. Tout ceci permet de soumettre une majorité d’opprimés au profit d’une poignée de privilégiés, sans jamais remettre en question l’ordre social.
Ce constat me passionne et me guide dans l’écriture de la pièce. J’imagine alors des scènes où mon héroïne, très consciente des mécanismes qui l’oppressent, comprend comment les retourner à son avantage. J’imagine la mise en abyme d’une troupe de théâtre à bout de souffle, qui s’efforce de continuer à jouer. J’imagine un narrateur ambivalent mais lucide qui cherche à réparer ses erreurs. Et afin de rendre cette analyse la plus accessible possible, j’utilise l’humour, l’émotion et l’aventure comme vecteurs pour tisser des liens avec le public. Ainsi se crée un récit alternatif qui, je le souhaite, sera porteur d’espoir.
Encouragée par ces pistes prometteuses, je me sens pousser des ailes. Je m’autorise à agrandir sans limite la distribution, à l’instar d’un Cyrano de Bergerac, au point d’atteindre le chiffre vertigineux de 45 personnages ! Après tout, la pièce titanesque d’Edmond Rostand qui devait être un gouffre financier, ne s’est-elle pas avérée l’un des plus grands succès théâtraux de tous les temps ? Une folie certes, compte tenu de la catastrophe financière que traverse actuellement le monde du spectacle. Mais un défi créatif aussi, un pied de nez aux coupes budgétaires. Une façon aussi de célébrer et d’incarner dans la forme la démesure de cette femme subversive, éprise de justice et de liberté. Un acte de résistance, en somme.







